Bonjour Journal. Aujourd’hui j’ai beaucoup pleuré, et cela m’a donné à réfléchir.
S'il y a bien une chose que j’ai appris de ma mère, c’est que quelle que soit l’échelle d’un groupe ou d’une foule, ce dernier est toujours comparable à un seul individu.
Dans un système comme le nôtre, où la productivité et le profit priment sur le bien-être et la condition humaine, il est clair que la tête qui nous dirige est aveuglée par une étoile quelconque, qu’elle cherche à atteindre à tout prix.
Ainsi, ce système se sert de ses mains régisseuses, son système médiatique et son système financier pour tirer sur son propre crâne afin de l’étirer vers le progrès. Progrès qu’il n’est pas stupide de rechercher, loin de là. Plus le corps est grand, plus il aura de surface proche du confort apporté par l’évolution.
Mais là où la logique devient faussée, c’est que plus la tête est loin du sol, plus les différences de pressions et de qualité de vie sont grandes d’un point à l’autre. On pourrait penser que la solution, c’est que l’énergie des pieds et de tout le corps se transmette aux bras et à la tête afin de faire entendre son intérêt : garder les pieds sur terre.
Seulement, bien que je répugne à le dire, il y a bien une chose que j’ai apprise de mon père. Gravir les échelons de la colonne vertébrale politique pour atteindre la tête qu’est notre système actuel, c’est faire des compromis vis à vis de ses valeurs humanitaires.
Ainsi, celui qui se tient au sommet du crâne est celui qui a abandonné toutes convictions personnelles pour adopter celle de la productivité du système ; toute l’énergie qui souhaiterait remonter pour raisonner un peu ce non-sens effrayant ne pourrait le faire qu’à condition d’y adhérer. Paradoxe schizophrénique et sadiquement masochiste.
Mon père est un Huula, c’est à dire un savant mélange entre un médiateur et un juge. Son métier est de transmettre la volonté du crâne politique au reste du corps autant que de faire entendre à la tête les souhaits du reste du système. Il est comme un cœur répartissant les énergies dans tout le corps. Mais comme un cœur, il se doit d’obéir sans discuter à la volonté maîtresse, ainsi il favorise les deux mains, qui nécessitent bien trop d’énergie pour tirer plus fort qu’elles ne le devraient.
La conséquence de tout ça, c’est que les mains financières et banquières sont devenues plus importantes que la tête elle même, qui doit obéir désormais à leur volonté aveuglément si elle veut continuer à monter.
Je ne parlerai pas de l’estomac, milieu moyen et associatif qui représente la voix du plus grand nombre vers la tête, partant pour ainsi dire dans toutes les directions pour n‘en choisir qu’une seule. Opinion qui sera envoyée entre-autres à la tête, comme si celle-ci avait encore le moindre pouvoir.
Il existe bien sur l’alternative de la magie, celle d’un monde régi par des lois bien plus profondes que la volonté humaine, mais ce sujet tabou est comme un organe sexuel : surtout ne pas le montrer aux gens tant qu’ils n’ont pas adhéré à un monde qui veut fonctionner sans.
Car oui, si les gens savaient la vérité dès le départ, alors la tête et les mains ne pourraient plus canaliser toute l’énergie sans en laisser à cet organe devenu vestigial.
Ainsi, ce corps inharmonieux, à force d’oublier que le plus gros du travail est de faire parvenir le confort à ceux qui en on le plus besoin, ne permet plus aux veines de répartir le sang. Tout ça à cause d’une tête qui est partie à la recherche d’une étoile sans prévoir de marche arrière.
Mais aussi vite que puisse aller cette tête, elle ne pourra jamais contrecarrer la plus simple évidence : les pieds ne pourront jamais se décoller du sol. Le fond du panier, les parjures du système, ceux qui n’ont plus le temps ni les moyens de remonter le réseau nerveux ou sanguin sont condamné à rester dans la mer acide, glaireuse et bileuse que cette tête recrache sous le poids de l’effort et de la malbouffe.
Pieds qui, en plus de ne plus pouvoir supporter leur existence désastreuse, sont envahis pas les fourmis de la folie, remplaçant le sang manquant à leurs sainteté morale.
Et de là où je suis, ces pieds mourants, je les vois.
Je vois une foule d’âmes désœuvrées et perdues, errantes dans la jungle morbide de notre système sans savoir ni même comprendre où ont-elles donc échoué pour être à ce point dépourvues de vie et d’énergie.
Chacun de ces fantômes avance malgré la difficulté, traverse chaque jour et chaque semaine, écrasé sous le poids de la défaite, pour certains même sous la somme des manques de toute leur famille, de tous leurs amis et connaissances.
Je vois ces gens faire de leur mieux, je les vois sourire et parler avec l’énergie du désespoir... si ils se taisaient alors ils ne seraient plus rien.
Que dois-je leur dire quand ils reconnaissent en moi la fille d’un noble, qu’ils m’accablent de tout leur mots et de leurs pires insultes ?
J’aimerais leur expliquer, j’aimerais leur montrer, « regardez, il est là le vrai problème ! C’est ce système qui vous empêche d’avancer, de la même façon qu’il m’a placé à un endroit ou je n’ai pas à m’inquiéter. »
Seulement ce n’est pas aussi simple. Trop concernés par leur propre survie, baignés dans les ordures consommables, envahissantes et consolatrices, nouvelles princesses prodiges du fléau, ils ne peuvent plus discerner la vérité, ils ne peuvent plus se préoccuper d’autre chose que de leur propre situation désespérée, et je les comprends.
Comment leur reprocher d’en vouloir à quelqu’un comme moi ?
Ils provoquent en moi une énorme envie de pédagogie, « Ô, voudrais-je dire, vous, les têtes pensantes qui nous tirent tous vers le haut, ne voyez-vous donc pas que vous êtes en train de nous écarteler ? Et vous, ô peuple soumis à la torture d’être ignoré même dans la mort, ne voyez vous pas que le problème est plus haut que le cœur ?».
Cœur dans lequel je suis née. Moi la grise, moi la morte, celle dont personne n’ose parler trop fort de peur d’être lié à mon déshonneur. Quelle joie que d’être aussi haut dans le corps quand on se sent si proche du fond du panier !
Panier dans lequel, si certaines pommes sont pourries, c’est parce que les gens ne mangent que celles du dessus. Panier dans lequel, si je suis une pomme, alors je suis empoisonnée.
Car crois moi ou non, journal, mais à force de tirer trop fort sur une tête, le cou cède.
Et quand les mains viendront quémander au cœur une nouvelle tête, j’espère bien être la goutte de cyanure qui fera refleurir le vase rouge de cette décapitation.
jeudi 1 juin 2017
Journal d'Aanore, troisième entrée : Le fantôme
Bonjour Journal, j'ai découvert je ne connaissais pas l’amour.
Je viens de me disputer avec mes parents.
Je me sens dans un état stable quoi que légèrement absent, et cela me remet à l’esprit pas mal de chose.
Il m’apparaît clair en voyant des amis ensembles, des couples ou même de parfaits inconnus faisant connaissance, que leurs discussions et contacts avancent vers une forme d’affection positive. Je n’éprouve pour ma mère ou d'autres membres de ma famille aucun sentiment de la sorte. Trop contrariée par mes propres soucis je n'ai jamais demandé "ça vas ?" à aucun d’eux, voir ma mère pleurer ne me fait aucun effet. J'ai toujours considéré comme acquis leur aide, mais je ne donne rien en retours. J'ai toujours quantité de chose à leur reprocher et autant de raison de leur en vouloir, pourtant je ne supporte pas la moindre petite remarque de leur part. Je pourrais citer bien d'autres exemples, que je n'ai pas tous en tête, mais il est clair que j'ai un grave problème en ce qui concerne le relationnel et même l'affectif avec mes parents.
A tel point que aujourd'hui, quand ma mère me dit que je me conduis comme si je leur voulais du mal, je ne peux que la croire.
Ne comprenant absolument pas l’origine de cette absence de ressenti, cela à toujours été mon principal argument pour me justifier : « je ne sais pas, je ne comprend pas », tout simplement car - pour faire dans la vulgarité - ça m'arracherais la gueule que de leur dire un petit mot gentil d’explication.
C’est très représentatif de comment je me sens : J'ai l’impression que toute une partie de moi même m'est bloqué quand je suis avec eux, comme si un manque de confiance en eux ou en moi m’empêchait de leur montrer qui je suis de peur de les décevoir, ou de peur qu’il ne me comprennent pas..
Malheureusement, cela fait plusieurs années que cette situation dure et ce n'est plus une excuse, mon comportement est devenu irréparable.
J’ai ainsi pris l’habitude d’être comme un fantôme hantant la demeure familiale, ou l’habitude est-donc de ne pas croiser mon regard en dehors des moments ou cela devient inévitable.
Ainsi, je suis avec mes parents comme une ombre, nos relations ne sont que pure formalités superficielle.
Pourtant, j’ai conscience qui je leur dois énormément, j’ai grâce à eu vécu dans une riche classe sociale et je me suis vu offert une éducation unique et précieuse, il serait même juste de dire que j’ai été pourris gâté.
Peut-être que ceci peut expliquer une partie de la puérilité de mon comportement avec mes parents, car j'ai le sentiment qu'il s'agit d'un orgueil enfantin mal placé.
J’écris tout cela ici non par volonté de me complainte sur mon sort - j’ai dépassé le seuil de moment de ce genre – mais bel et bien car j’ai réussi à en tirer profit.
Cette façon d’être avec ces gens, qui ont eux aussi ressentis une profonde tristesse vis à vis de ma personne, m’a permis de me rendre compte que je n’appartiens pas au même milieu social qu’eux, que leur placide façon d’accepter leur sort ne me correspond pas, et j’ai ainsi pu développer une volonté de changer le cours des choses qui je l’espère, ne m’abandonnera jamais.
Je viens de me disputer avec mes parents.
Je me sens dans un état stable quoi que légèrement absent, et cela me remet à l’esprit pas mal de chose.
Il m’apparaît clair en voyant des amis ensembles, des couples ou même de parfaits inconnus faisant connaissance, que leurs discussions et contacts avancent vers une forme d’affection positive. Je n’éprouve pour ma mère ou d'autres membres de ma famille aucun sentiment de la sorte. Trop contrariée par mes propres soucis je n'ai jamais demandé "ça vas ?" à aucun d’eux, voir ma mère pleurer ne me fait aucun effet. J'ai toujours considéré comme acquis leur aide, mais je ne donne rien en retours. J'ai toujours quantité de chose à leur reprocher et autant de raison de leur en vouloir, pourtant je ne supporte pas la moindre petite remarque de leur part. Je pourrais citer bien d'autres exemples, que je n'ai pas tous en tête, mais il est clair que j'ai un grave problème en ce qui concerne le relationnel et même l'affectif avec mes parents.
A tel point que aujourd'hui, quand ma mère me dit que je me conduis comme si je leur voulais du mal, je ne peux que la croire.
Ne comprenant absolument pas l’origine de cette absence de ressenti, cela à toujours été mon principal argument pour me justifier : « je ne sais pas, je ne comprend pas », tout simplement car - pour faire dans la vulgarité - ça m'arracherais la gueule que de leur dire un petit mot gentil d’explication.
C’est très représentatif de comment je me sens : J'ai l’impression que toute une partie de moi même m'est bloqué quand je suis avec eux, comme si un manque de confiance en eux ou en moi m’empêchait de leur montrer qui je suis de peur de les décevoir, ou de peur qu’il ne me comprennent pas..
Malheureusement, cela fait plusieurs années que cette situation dure et ce n'est plus une excuse, mon comportement est devenu irréparable.
J’ai ainsi pris l’habitude d’être comme un fantôme hantant la demeure familiale, ou l’habitude est-donc de ne pas croiser mon regard en dehors des moments ou cela devient inévitable.
Ainsi, je suis avec mes parents comme une ombre, nos relations ne sont que pure formalités superficielle.
Pourtant, j’ai conscience qui je leur dois énormément, j’ai grâce à eu vécu dans une riche classe sociale et je me suis vu offert une éducation unique et précieuse, il serait même juste de dire que j’ai été pourris gâté.
Peut-être que ceci peut expliquer une partie de la puérilité de mon comportement avec mes parents, car j'ai le sentiment qu'il s'agit d'un orgueil enfantin mal placé.
J’écris tout cela ici non par volonté de me complainte sur mon sort - j’ai dépassé le seuil de moment de ce genre – mais bel et bien car j’ai réussi à en tirer profit.
Cette façon d’être avec ces gens, qui ont eux aussi ressentis une profonde tristesse vis à vis de ma personne, m’a permis de me rendre compte que je n’appartiens pas au même milieu social qu’eux, que leur placide façon d’accepter leur sort ne me correspond pas, et j’ai ainsi pu développer une volonté de changer le cours des choses qui je l’espère, ne m’abandonnera jamais.
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