mercredi 23 novembre 2016

Nature humaine et capitalisme - ESPOIR

"Il n'y a pas de spectacle assez horrible, assez malsain ou assez rebutant pour que l'humain ne finisse par s'y habituer."


Une des plus grandes victoires du capitalisme est d'avoir fait croire au peuple que ses problèmes sont dues à la nature humaine, que le monde va mal à cause de l'existence même des humains.
C'est ainsi qu'il fit naître un découragement profond des humains envers leur avenir, c'est ainsi qu'il lança la jeunesse dans une guerre permanente contre le bon sens et la réflexion.
(En plus d'être gavée de connaissances au point de ne plus vouloir apprendre)

Désormais, chacun est libre de se sentir noble dans l'abandon du rôle qu'il aurait pu jouer dans l'histoire - ça ne sert à rien, c'est la nature humaine.
 

 Stupeflip - L'enfant fou

"Nature humaine :

Ensemble des traits qui caractérisent le genre humain.
"Parler de nature humaine, c'est parler d'une essence universelle de l'homme, c'est dire qu'il existe un certains nombre de caractéristiques communes à tous les hommes sans restriction. C'est dire qu'il existe une définition de l'homme telle qu'elle s'appliquerait à tous et à chacun d'entre eux sans reste."
Source
C'est un peu comme dire de quelqu'un qu'il a un comportement inhumain, cela n’a pas de sens.
Il est humain, donc son comportement l'est aussi.
Si l'humain était né pour se détruire il ne se fatiguerait pas à construire, ni pour lui ni pour son avenir.

Il y a plusieurs jugements de la nature humaine.
La première, c'est l'idée que les humains, bien qu’imparfaits, sont perfectibles.



Un autre jugement, plutôt similaire au premier consiste à dire que la nature humaine est malléable, qu'elle évolue en fonction des valeurs, des comportements et des époques.
Jugement défendu par certains philosophes des Lumières, puis repris ensuite par certains penseurs socialistes qui pensaient que l'homme se moulerait à tout système qu'on lui imaginait. Les réflexions de ces théoriciens ainsi que leurs théories furent une influence du fameux philosophe, économiste et révolutionnaire Karl Marx.
Source



Un troisième jugement consiste à se dire que chaque humain est guidé, porté, et soumis à des pulsions contradictoire, donc insatiables.
"Ce dernier point de vue de la nature humaine est compatible avec la réflexion de l’enseignement chrétien. Les Écritures enseignent que nous sommes faits à la fois à l’image de Dieu et des créatures déchues ; dans les paroles de saint Paul, nous pouvons être des « instruments de justice » au même titre que des « instruments de méchanceté. » Les êtres humains sont capables d’actes misérables et d’actes de noblesse ; nous pouvons poursuivre le vice tout comme la vertu."
 Si l'on réunit les trois jugements... On obtient une espèce qui évolue en permanence, qui s'adapte à son environnement en bien ou en mal, et qui est donc soumise à des contradictions majeures dans son fonctionnement.
J'y reviens.


Maintenant, revenons sur le mot "Nature humaine"
Plus précisément sur "Nature".


Que savons-nous de Nature ?
(Mis à part le fait qu'elle se fait violer par notre société de consommation.)

Si par nature vous entendez :
"Le monde physique, l'univers, l'ensemble des choses et des êtres, la réalité"
Pourquoi ce que fait l'homme est-il moins naturel qu'une girafe mangeant des feuilles d'arbre ?
Tout est naturel dans ce cas.



Si par nature vous entendez "Ensemble des principes, des forces, en particulier de la vie, par opposition à l'action de l'homme" alors je vais vous donner une définition perso de la nature :

"Énergie à la base neutre n'ayant comme seul instinct que sa survie dans un milieu donné"

La première cellule vivante a donné lieu à ce qui nous entoure aujourd'hui. (Faune, flore etc...)

TOUTES ces espèces ont le même principe : à la base neutres, elles changent pour leur survie.

L'homme est identique.
Sa nature même est de s'adapter au monde qui l'entoure, duquel il n'est qu'un reflet. Sa violence ne devient ainsi qu'une défense contre les maux du reste du monde, sa haine devient un réflexe de méfiance vis à vis d'un sujet qui contrarie sa perception de la vie ou du bien-être.

C'est cette nature qui poussa maintes et maintes âmes à construire des choses durables, profitables par tous.

Mais que se passe-il quand certains, qui possèdent plus que d'autres, sont victimes de ce même instinct qui les fait défendre les biens qu'ils doivent à ceux qui n'ont pas le même confort ?
Ces personnes ayant plus de pouvoir, ont plus de facilité à défendre leurs intérêts que les autres. Doit-on comprendre ainsi qu'il sont plus important ? Est-ce normal que la volonté du petit % le plus riche surplombe ainsi les autres 99% ?

Dans le monde d'aujourd'hui, on voudrait nous faire croire que pour avancer, il faut que chacun avance pour son propre intérêt, afin de garantir à lui et à ses descendants de quoi vivre comme il l'entend. 

Si le capitalisme (comme d'autres pouvoirs politiques, et même certaines instances religieuses) peut nous faire croire que la nature humaine est un tort, c'est tout simplement car à nos jours, s'adapter sainement à notre univers est quasiment impossible. D’où les contradictions et autres pulsions contraires qui nous animent : Il est impossible de vivre dans notre modèle de société sans abandonner son instinct et ses envies.


 Oui ! (YES WE CAN) Il faut changer la "nature humaine", oui il faut faire changer l'équilibre de la masse, faire cesser ces paradoxes de conscience.

Mais pour cela il faut changer le monde qui nous façonne.
Pas pour nous, nous on est déjà mal-adaptés, mais pour l'avenir de notre espèce.

Il n'y a pas de nature humaine, mais l'humain appartient à une Nature qui se définit en un mot :

L'adaptation.

Peut importe ce que nous faisons, les générations futures s'en accommoderont.
Alors à nous de faire en sorte qu'elles n'en deviennent pas pires que nous le sommes.

"Il n'y a pas de spectacle assez horrible, assez malsain ou assez rebutant pour que l'humain ne finisse par s'y habituer."

N'oublie jamais ça.

Jamais.

l'Artpocalypsisme est une notion Artpocalyptique.
L'art comme mise en garde, l'art comme jugement.
L'art de tous comme instance dirigeante.
Se servir de l'inconscient des gens aux travers de leurs œuvres pour établir un système politique ouvert à tous.
Car aucun inconscient ne prime sur un autre.
AUCUN
Merci les surréalistes.

mardi 1 novembre 2016

Une bière à la main #2 - Le petit trompettiste

Encore un article de notre fantôme préféré (plus assidu que certains matelots, je dois le dire)

Une bière à la main #2 - Le petit trompettiste

Holà moussaillon ! Entre, entre, Nancy viens d'recevoir un nouveau vin, une pure merveille !.. Mais bon, moi j'me contenterai d'ma bière, t'façon j'aurai pris du rhum sinon !
Enfin bref ! Installe toi, mon gars ! J'espère que tu t'souviens de c'que je t'ai raconté la dernière fois, parce que c'est la suite !
Si t'as un peu trop picolé et que tu as eu un trou de mémoire, t'en fais pas, j'ai l'habitude, alors j'vais te rafraîchir la mémoire !
Donc Charlie Parker, alias "The Bird", est considéré comme le plus important saxophoniste et un des trois piliers de l'histoire du jazz, mais on en reparlera à la fin.
Il a notamment initié le mouvement bop et a permis l'enrichissement harmonique du jazz qui sera prioritaire à la mélodie (pour faire plus français, il privilégie les accords plutôt que le thème).
Bon j'vais pas te parler du personnage plus en détail que ça, de ses problèmes plutôt commun pour un musicien (instabilité, drogue, sexe etc.) ou sur  le fait qu'il soit mort très jeune, à 34 ans (un peu moins tu me diras et il aurait pu être plus connu que ça en intégrant le club des 27, m'enfin bon).
Ce qu'il faut retenir, c'est que c'était un personnage assez égocentrique qui interagissait aussi bien avec son public que ses musiciens. Il aimait souvent faire des clins d'œil musicaux, comme lancer des petits appels dès qu'il voyait une jolie fille passer.
Mais c'est sa première séance en studio qui est la plus intéressante à raconter !

Le 26 novembre 1945, Charlie Parker est prêt à faire sa première séance studio chez Savoy Records (non ça n'a rien à voir avec du fromage) pour enregistrer 3 morceaux originaux (pas des reprises) de façon assez désorganisé et un peu à la va-vite, en compagnie du contrebassiste Curley Russell, du batteur Max Roach, de Dizzy Gillespie son ami avec qui il fut le précurseur du bop, qui normalement trompettiste, se mit au piano (peu de virtuosité mais jeu harmonique très fort), remplacé sur son instrument par un jeune musicien craintif et terrifié à l'idée de devoir jouer dans l'urgence, sous pression.
Il faut savoir que Charlie Parker, notamment lors de cette séance, était perfectionniste, et pouvait refaire une prise une dizaine de fois. Le premier morceau enregistré lors de cette séance par exemple, Billie's Bounce, un simple swing, a été refait 5 fois. Les prises étaient pourtant toutes bonnes mais Parker cherchait à toujours améliorer son propos  sans se soucier de celui des musiciens, et sans se soucier de la fatigue de ces derniers. C'est notamment le cas du petit trompettiste, qui d'une part avait des prises où il était meilleur mais que Parker ne gardait pas, et d'autre part se fatiguait rapidement.
Si bien qu'on publia ce qu'on appelle aujourd'hui les Master takes, et parallèlement les alternate takes, qui sont les prises non choisis par Parker mais qui sont pourtant toutes aussi bonnes, et où notamment le petit prodige est vu sous un meilleur jour.

Bon, la séance totale dura plus de 3 heures prévu à la base, le gamin avait disparu à la fin, de peur de devoir jouer le dernier morceau qu'il redoutait, pensant que c'était au delà de ses compétences à l'époque.
Depuis ce jour, le garçon avait appris la peur et l'angoisse, et c'est ce qui lui a permis de mûrir et de devenir l'un des plus grands trompettiste de l'histoire. Il jouera avec un nombre incroyable de jazzman connu, et sera l'initiateur du dernier grand courant du jazz, le free jazz, plus ouvert notamment vers l'instrumentalisation électronique, en compagnie entre autres de son ami Marcus Miller, avec lequel il réalisera l'album "Tutu" en 1986.
Et oui, je parle bien sûr de Miles Davis ! Parce que même si l'on a tendance à le citer parmi les plus grands jazzman, force est de constater que sans Charlie Parker, il n'y aurait jamais eu Miles Davis tel qu'on le connait aujourd'hui !
Il s'est d'ailleurs beaucoup inspiré de son mentor, aussi bien sur sa façon de jouer, son ouverture musical, mais également sur sa manière de gérer une séance studio. Il prendra l'habitude de mettre ses musiciens sous pression comme il l'a lui-même vécu pour qu'ils puissent donner le meilleur d'eux-mêmes, car avec le recul, il se rendra compte que c'est ce qui lui a permis de jouer aussi bien avec Charlie Parker.

Si je devais trouver une morale à toute cette histoire, c'est qu'il ne faut pas juger des apparences, et ne pas se contenter de gratter la surface, parce que quand on cherche plus en profondeur, on se rend compte de la complexité de la vérité et de sa beauté. Si pour beaucoup Miles Davis fait parti des plus grands musiciens jazz de tout les temps, c'est oublier que Charlie Parker a posé la première pierre de l'édifice Davis, et que c'est lui qui reste un des pilier du jazz, avec Louis Armstrong et Duke Ellington, mais ça, on y reviendra peut-être une autre fois !

Sur ce j'te laisse avec un des morceaux enregistré lors de cette fameuse séance. Pour la petite et dernière anecdote, la séance devait servir à enregistrer 3 morceaux originaux comme je te l'ai dit. Cependant lorsque le producteur se rendit compte que lors du dernier morceau, il entendait quelque chose qu'il connaissait, il a coupé les musiciens. C'était en effet une reprise d'un standard de jazz (un morceau emblématique du jazz si bien qu'on en oublie très souvent qui a été le compositeur à l'origine). Il s'agissait en réalité de Cherokee, un standard connu pour son tempo rapide (300 à la noire les amis, les métalleux ravalent leur fierté !). Après un instant de réflexion, Charlie Parker enchaîna directement en demandant aux autres de reprendre la même chose. Interloqués, les autres s'exécutèrent. Mais après avoir joué l'introduction, au lieu de partir sur le thème du morceau, ce vieux loup décide de sauter le thème et d'enchaîner directement sur son chorus (solo improvisé je rappelle). C'est d'ailleurs CE morceau l'emblème même du bop : qu'importe la mélodie ou le thème, ce qui compte, c'est la grille, la suite d'accords, sur lesquels les musiciens peuvent s'exprimer librement.
Bref, je trinque à la mémoire de Miles Davis et de tous ces autres musiciens, et j'te dis à la prochaine, pour une autre histoire !


--> Charlie Parker - Koko, 1945